Le règne du dollar touche à sa fin… et ce n’est pas une conséquence mais bien le but des politiques monétaires appliquées par les banques centrales.

Alors que les déclarations officielles se multiplient, la vérité reste cachée. Le président des États-Unis d’Amérique, Donald Trump, fait croire au monde qu’il est en train de reprendre la main politique sur sa banque centrale, la fameuse Fed.

Pendant ce temps, les déclarations politiques concernant le Brexit passent sous silence l’essentiel, c’est-à-dire qui est réellement à l’origine de cette idée de « Brexit » et surtout pourquoi. Il est important de rappeler que le Brexit est aussi, à l’origine, une initiative de la City londonienne.

Un Royaume-Uni dégagé de la Zone euro permettrait en effet à l’industrie financière britannique de gérer librement (sans contraintes juridiques ou politiques émanant de la BCE ou des instances européennes) la transformation de la monnaie mondiale, qui passerait du dollar US actuel en DTS. Pour rappel, DTS signifie « droits de tirage spéciaux » – ce terme recouvre un panier de devises institué par le Fonds monétaire international (FMI).

Le public, médusé par les médias plus ou moins coordonnés par les banquiers centraux, croit dur comme fer aux nouvelles déclarations de Mark Carney, ancien de Goldman Sachs passé ensuite gouverneur de la banque centrale du Canada et désormais nouveau patron de la Banque centrale anglaise.

Selon lui, les banques centrales devraient se coordonner pour précipiter la chute du dollar en tant que monnaie mondiale. Mark Carney met ainsi en œuvre un plan préétabli de longue date. Il ne réagit pas, comme ses déclarations le laissent entendre, à une nouvelle conjoncture qui serait soudainement apparue.

La fin du dollar, un calendrier maîtrisé
En réalité, tous ces événements (déclarations de Donald Trump et de Mark Carney), parfaitement reliés et coordonnés, suivent un calendrier global maîtrisé + JIM Globalist consistant à assurer la transition entre dollar et DTS.

Les premiers indices de cette pièce de théâtre, écrite par les banquiers centraux aux ordres des principales puissances financières siégeant notamment à la City of London, sont à rechercher en 2011, à l’époque des déboires judiciaires américains de Dominique Strauss-Kahn, alors directeur du FMI. La revalorisation de l’or dans le bilan des banques est en réalité une étape décisive de l’abaissement du rôle du dollar.

La réalité est que DSK, alors directeur du FMI, travaillait en coulisses à la création d’une monnaie panafricaine adossée à l’or libyen, le dinar-or. Cette monnaie était destinée à entrer dans le panier de monnaies (DTS) qui remplacera le dollar américain en tant que monnaie mondiale.

Nous apercevons déjà, en 2011, ce qui allait se produire huit ans plus tard, en 2019 – à savoir la revalorisation de l’or dans le bilan des banques. Cette revalorisation, décidée au sein de la Banque des règlements internationaux (BRI), est entrée en vigueur en mars 2019.

La valeur des monnaies locales qui interviendront dans le panier de monnaies des DTS sera réévaluée régulièrement sur la base de leur adossement concret à des matières précieuses tangibles. L’or servirait ainsi à nouveau, avec d’autres biens tangibles, d’étalon partiel – le temps du moins que soit installée et stabilisée la monnaie mondiale.

On remonte à la Révolution
À la vérité, cette pièce de théâtre n’est que le dernier tableau d’un triptyque historique. La première séquence se situe au XVIIIème siècle, lors des révolutions occidentales. Ces dernières ont mis en œuvre en Occident un nouvel ordre politique avec le régime parlementaire dit représentatif ; lequel représente surtout, en réalité, la force de frappe des puissances financières.

Le deuxième volet du triptyque s’est joué à Bretton Woods au sortir de la Deuxième guerre mondiale. En 1944 ont ainsi été imposées deux choses contradictoires mais complémentaires : un ordre financier international, par l’instauration de deux organisations financières mondiales de premier ordre : le FMI et la Banque mondiale ; le dollar américain comme devise de référence pour les échanges économiques mondiaux.
Enfin, nous assistons à la troisième partie du triptyque, qui n’en finit pas de se terminer. Elle consiste à imposer une monnaie mondiale qui sera : un panier de monnaies sur le modèle du Bancor préconisé par Keynes en 1944 ; le premier pas vers le gouvernement mondial auquel aspirent les banquiers commerçants de la City.

Ne confondons pas cause et effets
Ainsi donc, l’actualité est riche de fausses informations selon lesquelles le dollar ne pourrait plus être une monnaie mondiale en raison des politiques américaines récemment suivies par Donald Trump.

C’est là confondre la cause et les effets !

Car précisément, la politique économique et monétaire de l’actuel président américain suit le programme déterminé de longue date par les banquiers centraux.

Il consiste à rendre au dollar sa seule place de monnaie locale et à remettre l’empire américain dans les limites d’un État dont la puissance ne doit pas être disproportionnée par rapport à d’autres puissances. Les différentes forces politiques ont pour rôle et pour fonction de s’autoréguler sous l’œil attentif et vigilant des banquiers régulateurs.

C’est en grande partie l’industrie financière qui a mis Donald Trump au pouvoir, par l’intermédiation de Cambridge Analytica, la société financée par Robert Mercer et dirigée, à l’époque, par Steve Bannon.

Ce sont les mêmes intervenants qui, à l’origine de la chute de l’empire américain, avaient participé à créer l’empire britannique, puis l’empire américain. La caste financière au pouvoir utilise, dans l’ombre, les États transformés provisoirement en empire, afin d’imposer à terme un gouvernement mondial à sa solde.

Les banquiers savaient dès 1944 qu’une monnaie locale n’était économiquement pas qualifiée pour répondre techniquement aux besoins d’une monnaie mondiale (lire à ce propos « Comment et pourquoi le dollar va laisser la place aux DTS comme monnaie mondiale », dans Les Raisons cachées du désordre mondial).

Ces mêmes banquiers ont pourtant accepté de jouer le jeu de l’empire américain, pour une bonne raison : ils ont ainsi réussi, grâce aux Américains, à imposer à la même époque – avec le FMI et ce qui est aujourd’hui connu comme la Banque mondiale – les ferments institutionnels de l’avenir monétaire et financier international.

Des « crises » bien arrangeantes
Ces mêmes banquiers savaient pertinemment que les problèmes financiers liés au dollar monnaie mondiale arriveraient tôt ou tard. Ces difficultés devraient ensuite être réglées par des « crises » qu’il conviendrait de maîtriser afin d’arriver à leurs fins : la mise en place d’une monnaie mondiale viable gérée par les institutions déjà en place.

Pour résumer, les banquiers commerçants :

ont pris le contrôle des États par le biais des régimes parlementaires « représentatifs » et des partis politiques ;
ont pris le contrôle de la gestion monétaire des États par le biais de la création des « banques centrales » ;
ont pris le contrôle de la gestion financière mondiale par le biais d’organismes centralisateurs tels que la BRI (banque centrale des banques centrales), le FMI et la Banque mondiale ;
sont en voie d’imposer une monnaie mondiale dont ils auront le contrôle exclusif.
Cette monnaie mondiale sera d’autant mieux contrôlée par les banquiers qu’ils mettront les différents États en concurrence pour la détention des parts de cette monnaie.

La méthode de la mise en concurrence, notamment des « partis politiques », qui a si bien réussi aux banquiers pour contrôler les États, reprendra du service pour le contrôle total de la monnaie, au niveau mondial cette fois. Au-delà de la détention étatique des parts de DTS, cette monnaie mondiale sera gérée, sans contre-pouvoirs, par les banquiers.

Par ailleurs, ce contrôle monétaire sera total car les différentes monnaies, en particulier la monnaie mondiale, circuleront sous forme totalement dématérialisée. Ainsi, tout contestataire, que ce soit au niveau étatique ou au niveau individuel, se verra autoritairement privé de l’accès à la monnaie par les « banquiers dirigeants ».

Chacun doit comprendre que la fin de l’empire américain ne signifie certainement pas la fin de la domination financière. La disparition de l’empire américain est tout au contraire l’étape nécessaire à l’établissement d’une domination globale de l’industrie financière.

Les banquiers, qui agissent dans l’ombre, jouent avec les informations, tels des prestidigitateurs, afin de mettre en avant les pantins politiques et leur prétendues décisions autonomes pour mieux dérober et laisser dans l’ombre la réalité politique de leur prise de pouvoir.

Tous les empires occidentaux qui sont tombés sous le joug des banquiers commerçants ont connu une triste fin : il en sera de même pour l’empire américain.

La Chine et la Russie semblent pourvues de forces internes de résistance. Cependant, auront-elles des dirigeants suffisamment avisés et suffisamment solides – c’est-à-dire étayés par des forces internes organisées, dotés d’une structure intellectuelle et idéologique alternative viable –, pour ne pas tomber, par le moyen des DTS, sous l’entier contrôle des banquiers commerçants messianistes ? C’est précisément dans ces termes que la question doit être posée…

Par Valérie Bugault − Le 1er octobre 2019 − Source La Chronique Agora

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Valérie Bugault est docteure en droit de l’université Paris-I-Panthéon-Sorbonne. À l’occasion de sa thèse portant sur le droit de l’entreprise, elle a élaboré une théorie juridique unifiée, qualifiée « d’iconoclaste », de l’entreprise. Elle a travaillé comme avocate fiscaliste dans le domaine des prix de transfert ainsi qu’en droit fiscal interne avant de cesser sa carrière d’avocate pour se consacrer à l’analyse des problématiques de géopolitique économique.Elle a co-écrit un livre, Du nouvel esprit des lois et de la monnaie. Elle est également l’auteur des ouvrages La Nouvelle Entreprise et Les Raisons cachées du désordre mondial. Valérie Bugault table sur un assainissement financier et économique de la planète en croyant qu’il est grand temps de sortir de l’état actuel des choses qui favorise les paradis fiscaux.

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