Actuellement en France 11500 personnes environ se suicident chaque année ; faisant ainsi quatre fois plus de morts que les accidents de la route. Apparemment le gouvernement préfère plus s’occuper des automobilistes : cela rapporte de l’argent. Soigner le mal de vivre coûte de l’argent. Il faut ajouter aussi à ce chiffre les tentatives de suicides estimés à 240.000 annuellement. On voit l’enjeu que cela représente en coût pour la société. Nous tenons dans ce domaine le record européen : c’est dans notre pays que le risque de suicide est le plus élevé. Tel est le beau résultat de la création par Giscard de ce qu’il a appelé « La Nouvelle Société ».
Les 12ème Journée Européenne sur la dépression tentent de limiter le phénomène (1er au 10 octobre dernier).
Il y a une grande évolution dans l’abord du suicide que l’on attribue quasiment toujours à une dépression à laquelle s’ajoute un facteur déclenchant comme par exemple des problèmes conjugaux ou financiers. Or les chercheurs ont constaté que dans 70 % des cas de suicides, il n’y avait pas de facteurs psychiatriques sous-jacents au moment du « passage à l’acte ». Inversement des malades dépressifs chroniques ou bipolaires (variations brutales de l’humeur) ne se suicident jamais. D’où l’idée que la tendance au suicide serait une maladie autonome favorisée par l’ensemble des maladies psychiatriques y compris peu voyantes. Il y aurait un facteur individuel de vulnérabilité. Effectivement chacun d’entre nous a connu dans son entourage un suicide complètement inexpliqué.
Ces cas seraient explicables essentiellement par un trouble cognitif caractérisé par l’impossibilité de prendre une décision importante. Ce sont de futurs « suicidants » qui pour une raison ou une autre ont finalement fait récemment dans leur vie, des choix risqués ou désavantageux qu’ils n’arrivent pas à assumer. J’ai connu des cas de cette nature. C’étaient des personnes considérées comme équilibrées et n’ayant jamais fait de tentatives de suicide.
Une attitude d’hésitation dans une situation importante dans la vie d’un homme peut être considérée comme un « marqueur », un signe d’alerte qu’il est intéressant pour tous de prendre en charge. C’est actuellement le conseil à donner à tout le monde. Car ces « suicidants » ont 32 fois plus de risque de se suicider que le reste de la population. Les chercheurs sont donc persuadés que bientôt sera mis en évidence un biomarqueur de détection, c’est-à-dire un test biologique. Ce qui par ailleurs expliquerait les tendances familiales au suicide.
La prise en charge de ces patients suppose une reconnaissance par l’entourage prenant appui sur des valeurs communes notamment dans le domaine de la morale. De plus il existe des traitements simples comme le lithium déjà utilisé dans un certain nombre d’affections psychiatriques. La psychothérapie peut être utile ainsi que les anxiolytiques et antidépresseurs. Elle peut se faire d’ailleurs par de simples conversations avec l’entourage qui bien souvent est le seul à comprendre et guider et aider à assumer celui qui a un choix important à faire dans sa vie.
Si le suicide des hommes est une maladie autonome en raison de l’impossibilité de faire des choix, il en est de même des nations. Le gouvernement français en est un bel exemple.
Dr Jean-Pierre Dickès
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