L’Afrique subit toujours de plein fouet les conséquences mortelles du virus Ebola même si les médias occidentaux en parlent moins.

Sans doute, en Europe, serez-vous sollicités à l’approche de Noël pour aider financièrement certaines ONG comme MSF ou d’autres organisations qui envoient en Afrique des médecins et des personnels soignants.

Bien évidemment, la générosité des Occidentaux, Européens ou Américains, viendra bien à point pour approvisionner notre continent africain en matériel médical. Et vos médecins et infirmiers seront bienvenus.

Mais il faut aussi dire la vérité, même si elle dérange : la situation serait moins catastrophique s’il y avait moins de nos médecins noirs dans vos pays blancs ! Ce n’est pas une question de racisme. C’est au contraire une question essentielle pour l’avenir de l’Afrique : il faut que les élites africaines cessent de faire leur vie en Europe ou en Amérique. C’est dans leur pays d’origine que les médecins africains sont les plus nécessaires !

Partir en Europe fait rêver beaucoup d’Africains qui imaginent un Eldorado où l’argent coule à flots. Mais tous nos étudiants africains qui ne reviennent jamais au pays sont autant de cerveaux qui manquent cruellement en Afrique.

Oui, ici en Afrique, nous sommes d’accord avec les conclusions de Bernard Lugan, pourtant si critiqué en France.

Lisez ceci :

Les médias nous disent que si l’Afrique ne parvient pas à combattre Ebola c’est parce qu’elle manque de médecins. Faux ! L’Afrique a des médecins, mais ils ont émigré en Europe ou aux Amériques.

Ceux qui furent formés en Afrique sont partis vers des cieux meilleurs et ceux qui le furent en Europe y sont restés… La vérité est que l’Afrique exporte ses personnels médicaux alors qu’en moyenne, elle compte moins de 15 médecins pour 100 000 habitants contre 380 en France [1].

En 2008, le Center for Global Development chiffrait à 135 000 les personnels médicaux africains (médecins, infirmiers et autres) exerçant hors d’Afrique, dont 28 000 médecins originaires d’Afrique sud-saharienne. S’il n’y a pas de médecins au Liberia, en Sierra Leone, en Guinée et au Mali c’est parce que ces déserteurs ont abandonné leur continent pour aller s’employer dans les pays du Nord [2].

Les conséquences de ce scandale sont clairement apparues le 26 novembre 2014, quand, pour tenter d’enrayer la propagation d’Ebola, la Commission européenne proposa de mobiliser 5 000 (! !!) médecins européens. Le Commissaire à l’Aide humanitaire, M. Andriukaitis déclara ainsi qu’il avait « (…) appelé les ministres de 14 États membres pour les exhorter à envoyer plus de personnel médical dans les pays frappés par Ebola ».

Avant de faire appel aux médecins européens, pourquoi M. Andriukaitis n’a-t-il pas songé à exiger des milliers de médecins africains exerçant au sein de l’UE, de se porter volontaires pour aller soigner leurs frères dans le malheur ?

L’exemple d’Ebola n’est pas isolé. Impuissantes, les autorités de Madagascar, qui font actuellement face à une épidémie de peste, viennent de lancer un appel à l’aide à l’Europe alors que des centaines de médecins malgaches exercent dans les limites de l’UE. Rien qu’en France, ils sont 770 (! !!) [3]. Ne seraient-ils pas plus utiles dans leur pays ? Pour les remplacer, l’UE va donc devoir faire appel à des médecins européens. Comme toujours.

Cette question des médecins africains dans l’UE est révélatrice de ce « grand remplacement » qui se fait à tous les niveaux de la société et que certains considèrent comme un « fantasme ». En 2008, le président sénégalais Abdoulaye Wade la qualifia de « pillage des élites des pays en voie de développement », ajoutant « (…) ce n’est pas honnête de vouloir prendre nos meilleurs fils ». Disons-le clairement, cette nouvelle forme de la traite des Noirs porte sur les plus précieux des Africains, ses diplômés, et elle se fait avec l’habituelle complicité des « gentils » de l’anti-ségrégation et des requins du capitalisme associés pour la circonstance. Au nom du paradigme de la culpabilité qui les hante, les premiers s’interdisent de voir qu’en les accueillant, ils saignent l’Afrique. Les seconds les encouragent à venir au nom des lois du marché, du travail global et de la mobilité de la main-d’œuvre.

Madame Taubira et le Cran sont étrangement silencieux sur cette question. Pourquoi ?

Bernard Lugan

Notes

[1] Center for Global Development (CGD), 2008.

[2] Contrairement à l’idée-reçue, ils ne vont pas combler le désert médical français, ce résultat d’une stupide et suicidaire politique de numerus clausus, puisqu’ils vont quasiment tous s’installer en ville, là où l’on ne manque pas de praticiens (Ordre des médecins, novembre 2014).

[3] Atlas national de la démographie médicale, Conseil de l’ordre des médecins, 4 juin 2013. Concernant les 19.762 médecins exerçant en France et titulaires de diplômes étrangers hors Union européenne, 31,5 % étaient originaires d’Afrique du Nord dont 22,2 % d’Algérie, 5,8 % du Maroc, 2,5 % de Tunisie et 1 % d’Égypte.

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