Dans une vidéo sur une chaîne Internet israélienne, Jacob Kedmi, d’origine russe, citoyen israélien, ancien combattant de la guerre du Kippour et chef du service secret d’Israël chargé des pays de l’Est européen « Nativ », revient sur le conflit en cours en Ukraine et les évènements de Boutcha. « Nativ » était engagé dans la Guerre Froide, notamment sur la campagne dont se souviennent les gens d’une certaine génération « Libérez les Juifs d’URSS » sous Brejnev.
À l’époque, tous les soviétiques désireux de foutre le camp se trouvaient des ancêtres israélites, pour obtenir un visa vers Tel-Aviv. Il commence par souligner que la désinformation anglaise a toujours été 1) la meilleure, 2) la plus professionnelle, 3) la plus basse. Kedmi cite un exemple tiré de la Première Guerre Mondiale où la conquête d’une ville belge par les troupes du Kaiser devint, grâce à une propagande intensive des journaux britanniques un cauchemar de viols, massacres, pillages et destruction. Récit parfaitement fantaisiste qui fit le tour du monde, dont la fonction réelle était d’entraîner les Etats-Unis dans la guerre. On y retrouve tous les ingrédients qui firent le succès de la diabolisation des Serbes, notamment dans l’épisode de Srebrenica, cité par les Izvestia, viols, massacres, pillages etc. On sait maintenant un peu mieux ce qu’il en était réellement, de même que pour le « génocide » des Albanais au Kossovo, parfaite fabrication, qui servit plus tard de modèle pour initier la seconde guerre d’Irak. Typologie de la propagande occidentale. Pourquoi Kedmi cite-t-il les Britanniques ? Parce qu’ils sont partout en Ukraine et en Moldavie, tout d’abord. Au point de susciter l’agacement de l’administration Biden, dont l’Ukraine est le pré carré. L’Empire états-unien admet les Anglais comme sous-fifres affectés aux tâches subalternes, leurs propres ambitions impériales post-Brexit plaisent moins au Grand Frère, qui n’aime pas la concurrence. Les Russes soulignent ce point précis fréquemment. Les Anglais, sur ordre de Churchill, armèrent, équipèrent, entraînèrent l’OUPA auxiliaire de la Wehrmacht qui venait de faire ses bagages en laissant des armes, dès 1945 pour combattre les Soviets. On comprend qu’un Israélien de sa génération s’en souvienne.
Jacob Kedmi souligne ensuite l’épisode de la maternité vide de Marioupol, « atrocité russe » vite glissée sous le tapis quand il devint clair qu’elle n’avait aucun fondement et que la femme enceinte interviewée partout avait été virée de cette maternité par les paramilitaires du bataillon Azov. Il reparle après de la fameuse attaque chimique en Syrie dont on cherche encore les victimes. Il cite l’hystérie des médias occidentaux « craignant » une attaque chimique, voire nucléaire, en cas d’insuccès de l’armée russe dans sa campagne ukrainienne. Kedmi suggère ensuite que les négociations en Turquie avec l’Ukraine sont un cadeau de Poutine à Erdogan qui aurait cédé au président turc dont le prestige en sort renforcé.
En ce qui concerne Boutcha, Jacob Kedmi fait les mêmes remarques que les Izvestia : pourquoi n’y a-t-il pas de sang sur les cadavres, pourquoi ceux-ci ont-ils tous un brassard blanc, pourquoi les a –t-on découverts 5 jours après le départ des troupes russes ? On se perd en conjectures !… Il souligne que les journalistes occidentaux sur place semblent manquer de la présence d’esprit de poser ces questions élémentaires. Il ajoute la déclaration d’un responsable américain : Sullivan. Celui aurait dit que la guerre en Ukraine — donc avec le sang des autres — durerait tant qu’il le fallait. D’après Jacob Kedmi, les services britanniques comptent sur une guerre de longue durée- entre 5 et 7 ans. La théorie Brezinski : un bourbier militaire et la pression économique. Jacob Kedmi critique ensuite les « experts » qui ne comprennent rien : c’est l’armée russe qui décide, conclut-il, pas les experts. L’armée russe est revenue au plan de départ, selon lui, écraser les Ukrainiens autour du Donbass et sécuriser la Crimée, également menacée. Au début, dit l’analyste israélien, les Russes ne s’attendaient à une vive résistance que de la part des fameux « bataillons », elle avait eu les yeux plus grands que le ventre. Mais l’armée ukrainienne, entraînée et équipée par l’OTAN depuis huit ans, se bat. Il s’agit donc de l’écraser autour des régions-clés, où sont massées la moitié des troupes ukrainiennes (100 000 hommes) : au Donbass. Ne leur faisaient face que 32000 hommes des républiques séparatistes. Depuis le début du conflit présent, comme en 2014, les volontaires du Donbass et de Lougansk sont ceux qui supportent l’essentiel des combats. Ne sont venues leur apporter leur soutien l’infanterie de marine russe et les forces spéciales tchétchènes que très récemment. L’armée russe, de surcroît, est en infériorité numérique dans cette opération par rapport aux Ukrainiens. L’ordre de raccourcir le front et de s’en tenir aux objectifs initiaux — empêcher l’épuration ethnique de style kossovar ou croate au Donbass — semble donc parfaitement rationnel pour l’analyste israélien. Il y a eu une mauvaise évaluation du rapport de forces au départ par l’état-major russe, dit-il. L’ordre, dans la guerre du Kippour à laquelle Kedmi a participé, n’était que de détruire les forces qui leur faisaient face sur le plateau du Golan. Rien d’autre, pas l’armée syrienne ou les Palestiniens du Liban, juste l’essentiel. Selon lui, l’armée russe serait revenue aux « fondamentaux » ces derniers jours.
Jacob Kedmi, parle aussi — ça lui tient visiblement à cœur — des bataillons nationalistes ukrainiens se servant de la population civile comme bouclier humain et du traitement médiatique occidental. Manifestement, il en parle à plusieurs reprises, la prise en otage des civils par le Hamas lors de l’opération de Gaza en 2008 lui est restée en mémoire. Ainsi que la façon dont la BBC notamment en avait parlé, critiquant un bombardement d’immeuble, oui à tous les étages inférieurs les terroristes nous balançaient des roquettes. Il est en effet assez logique que ceux qui se scandalisaient en 2008 des bombardements israéliens sur le Hamas se servant des civils comme boucliers humains à Gaza (la BBC qui suscite la colère de Kedmi), ne voient dans l’utilisation des civils par les « bataillons » ukrainiens comme bouclier qu’une technique de guerre tout à fait normale, dénonçant la « barbarie russe »!… Sans parler des néo-cons de tous bords, qui justifiaient Israël et condamnent la Russie…
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