Louis Perez y Cid a d’abord été étudiant à l’école des arts décoratifs avant de s’engager dans la Légion étrangère. En dehors de ses missions militaires, il a été amené à servir quelques années comme dessinateur et metteur en page à la revue Képi blanc. Officier servant à titre étranger, il quitte la Légion en 1998 mais devenu dessinateur de BD, il met encore souvent son talent au service de la Légion. Patrick de Gmeline est un historien militaire bien connu, auteur de dizaines d’ouvrages, couronné par dix prix littéraires. Il est aussi scénariste de BD historiques pour les éditions du Triomphe. Ensemble, ils viennent de signer un bel album d’hommage au général Bigeard.
Bigeard, un officier de légende
Bigeard, c’est le nom d’un officier de légende. Un héros militaire extraordinaire, entré à l’armée comme simple soldat et finissant général quatre étoiles. Un baroudeur qui a fait la Seconde Guerre mondiale, l’Indochine et l’Algérie. Un artisan du mythe et de la gloire qui entourent les paras français. Un Lorrain de plus entré dans l’Histoire.
Cet album de bande dessinée retrace avec brio son existence hors du commun. Car Marcel Bigeard naît en 1916 dans une famille très modeste. A peine a-t-il le brevet qu’il lui faut trouver un emploi pour contribuer aux rentrées financières de sa famille. Il est embauché dans une agence de banque et y est apprécié par le directeur. En 1936, il fait son service militaire comme simple soldat au 23e Régiment d’Infanterie de Forteresse à Haguenau, en sort soldat de 1ère classe et reprend le travail à la banque. Mais en 1939, il est rappelé au régiment. C’est la drôle de guerre. Il passe l’examen pour devenir sergent et se classe premier. La guerre éclate et il se fait très vite remarquer en prenant spontanément le commandement d’une patrouille pour aller chercher le corps d’un camarade tué dans les lignes ennemies, ce qui lui vaut une première citation et la croix de guerre. Fait prisonnier lors de l’armistice, il s’évade et rejoint Dakar. Le voilà adjudant coiffé du casque colonial, chargé d’organiser un camp militaire en brousse. Devenu sous-lieutenant – et donc officier -, il part au Maroc avec son régiment. Là, des officiers supérieurs lui proposent de se porter volontaire pour intégrer les parachutistes. L’entraînement se fait près d’Alger. C’est un moment décisif dans son existence. Tout le reste de sa vie, il aura une affection particulière pour les paras. Parachuté en Ariège, il doit organiser des opérations militaires avec l’assistance de la résistance. La guerre terminée, il est nommé capitaine dans l’infanterie coloniale. Nouvelle étape importante, il part avec son bataillon pour l’Indochine et, en 1947, mène des commandos dans la jungle. Retour en France où il est affecté au 3e Bataillon Parachutiste où il fait la connaissance de Massu, à l’époque colonel.
L’Indochine
Octobre 1948, nouvelle mission en Indochine. Il est briefé sur place par Château-Jobert, qui commande la demi-brigade coloniale de commandos parachutistes en Indochine. Les vraies missions paras commencent en 1949. On le désigne responsable de deux sous-secteurs en haute région tonkinoise, à la tête de plus de 2 500 hommes. Ses succès sont nombreux. Avec l’esprit d’indépendance qui le caractérise, il se permet de rédiger un rapport sur le trafic de piastres et d’opium dans lequel sont impliqués certains administrateurs civils. Ce qui lui vaut d’être relevé de son commandement, au grand dam de ses officiers. On lui donne le commandement du Bataillon de marche indochinois. Puis on le renvoie en France. Mais en juillet 1952, il part à nouveau en mission en Indochine à la tête de 665 paras. Ils vont devoir tenir huit jours de combat sans repos face à deux régiments entiers de Viêts. Les missions se succèdent, y compris au Laos. Les croix de guerre sont distribuées par dizaines à ces paras héroïques.
Promu commandant, lui et ses hommes sautent dans la nuit de Noël au sud-est de Na San. 1953, l’Etat-Major lui envoie le photographe et futur cinéaste Pierre Schœndœrffer qui accompagnera les paras le 17 juillet pour l’opération hirondelle : 2 500 paras sautent sur Lang-Son. Bigeard enchaînent les succès.
Le saut sur Dien Bien Phu
20 novembre 1953, Bigeard et ses hommes sautent sur Dien Bien Phu où ils vont écrire une page de gloire de l’armée française. En décembre 1953, Bigeard repart pour Hanoï. Mais le général Giap lance sa grande offensive sur Dien Bien Phu. Mars 1954, tout va mal. Deux collines sont tombées. 16 mars 1954, Bigeard et ses paras sautent à nouveau sur Dien Bien Phu encerclé. Malgré tout le courage exceptionnel de ces hommes qui vont tenir cinquante jours dans ce camp retranché, la défaite est inéluctable. Le 7 mai 1954, Dien Bien Phu tombe. Prisonnier, Bigeard tentera, sans succès cette fois, une évasion. Libéré quatre mois plus tard, il est promu Lieutenant-Colonel.
L’Algérie
Quelques mois plus tard, c’est l’Algérie qui gronde. Bigeard veut en être. Il va faire la chasse aux fellaghas. Ses hommes sont gonflés à bloc. Les « Bigeard Boys » traquent l’ennemi par tous les temps, dans les décors les plus rudes. Bigeard met au point les opérations héliportées pour l’effet de surprise. Les écrivains-reporters Joseph Kessel et Jacques Lartéguy viennent lui rendre visite. Malgré un bilan exceptionnel, son indépendance d’esprit ne plaît pas en haut lieu. Ses propos agacent le ministre de la Défense Chaban-Delmas. Bigeard est relevé de son commandement, écope de 60 jours d’arrêt et quitte définitivement l’Algérie. Il n’est donc pas sur place pendant le putsch d’Alger de 1961.
Le temps des mondanités et de la politique
Commence une autre vie pour Bigeard, faite d’honneurs et de mondanités forcées, mais il était plus heureux avant, répète-t-il. 1967, Bigeard est promu général. Il passe 30 mois au Sénégal comme commandant supérieur d’Afrique occidentale, puis se rend à Madagascar comme commandant supérieur des forces françaises du sud de l’Océan indien. Il se met à écrire ses mémoires. En 1974, il est général quatre étoiles et grand-croix de la Légion d’honneur. Valéry Giscard d’Estaing va l’entraîner sur un autre terrain : la politique. Il fait de Bigeard un secrétaire d’Etat à la Défense. Bigeard fait ensuite trois mandats de député. En 1988, il prend enfin un peu de repos, se remet à écrire. Le vieux soldat meurt le 18 juin 2010.
Cette bande dessinée ravira les jeunes adolescents qui rêvent de héros militaires, mais aussi tous les passionnés d’histoire militaire, quel que soit leur âge.
Avec Bigeard, Louis Perez y Cid (dessins) et Patrick de Gmeline (scénario), éditions du Triomphe, collection Le Vent de l’Histoire, 48 pages, 16,90 euros
A commander en ligne sur le site de l’éditeur
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