Dans un important discours prononcé mardi , Bachar el- Assad est apparu plus déterminé que jamais devant les 250 députés issus des élections du 13 avril dernier qui avaient pris leurs fonctions la veille: « Nous libérerons chaque pouce de notre territoire! » s’est il exclamé sous des ovations très nourries.  « Le peuple syrien a surpris une nouvelle fois le monde par sa participation exceptionnelle au scrutin et par le nombre considérable de candidats », a-t-il déclaré. C’était la première fois que le Président syrien s’adressait aux députés depuis juin 2012, au début de l’ancienne législature.

Ce discours diffusé en direct à la télévision syrienne n’a pas été relayé en France, où les médias mainstream ne font plus leur travail d’information. Ce nouveau Parlement a été élu le 13 avril dernier par la partie libre de la Syrie. Le parti Baas, au pouvoir depuis plus d’un demi-siècle en Syrie, et ses alliés ont remporté  la majorité des sièges. Le Parlement a élu à sa tête pour la première fois une femme, Hadia Abbas.  

Le président s’est d’abord félicité de l’importante participation du peuple et du choix de ses représentants pour adresser au monde le message clair d’un peuple qui s’attache à sa souveraineté quelles que soient les pressions. Il a insisté sur la différence de ce Parlement avec le précédent puisque les électeurs ont choisi des candidats « venus du fond de la souffrance ».« Soyez motivés par le travail au service de vos administrés, non pour vous-mêmes, exactement comme l’ont fait les blessés, les victimes et tous ceux qui se sont sacrifiés et qui continuent à le faire », a-t-il dit.

Il a mis en cause l’Occident qui continue de tenter d’ imposer son hégémonie au monde à n’importe quel prix, indiquant que ces conflits internationaux avaient débouché sur des conflits régionaux entre des pays qui œuvrent pour préserver leur souveraineté et leur indépendance face à des pays qui œuvrent pour favoriser des intérêts étrangers au détriment de leurs propre peuples, visant ainsi les pays d’Europe. “Ces conflits se sont reflétés directement sur la situation dans la région, en particulier en Syrie”. Pour lui, les pays qui soutiennent le terrorisme ont eu pour objectif, dès le début, de porter atteinte au concept de Patrie, et donc à la constitution. “Ayant échoué dans leur plan terroriste, ces pays ont élaboré un plan politique pour frapper la constitution et provoquer le chaos absolu dont l’issue doit être une constitution ethnique et confessionnelle qui nous transformerait d’un peuple patriote en des groupes divergents qui s’attachent à leurs confessions et qui recourent aux étrangers,” a-t-il dit. “Le régime confessionnel transforme les compatriotes unis en des ennemis et des adversaires”, a-t-il ajouté. Selon lui « l’unité ne commence pas par la géographie, mais par l’unité des citoyens; lorsque la patrie est émiettée par ses citoyens, la question de la partition géographique n’est plus qu’une question de temps. »

Hadia Abbas

Hadia Abbas, présidente du nouveau Parlement syrien

A propos des pourparlers de Genève 3, le président Assad a rappelé: « Nous avons présenté, dès le début de Genève 3, un document de principes qui constitue la base du succès des pourparlers avec les autres parties ». « Nous n’accepterons d’inclure aucun sujet en dehors de ses principes fondamentaux présentés à l’ONU, pour faciliter une solution politique en Syrie. » Ce document fait état d’un « gouvernement d’unité » mais ne fait pas mention d’un « organe exécutif de transition » dans lequel le président actuel serait d’emblée exclu. Ce qui est le point d’achoppement des discussions. Or le président syrien a assuré n’avoir reçu jusqu’à présent aucune réponse de l’Onu concernant ce document et pour le moment, à ses yeux, « les négociations n’ont donc pas vraiment commencé ».

Évoquant la trêve ou la cessation des hostilités qui avait été conclus à l’initiative de la Russie, le président Assad a indiqué que la trêve avait amené « plusieurs réconciliations qui avaient arrêté l’effusion de sang de beaucoup de citoyens syriens, ainsi que de nos forces armées. » Le président syrien s’est félicité des résultats politiques de la trêve, de même que des résultats militaires qui ont permis de nombreuses victoires, soulignant à cet effet la libération de Tadmor (Palmyre), dés le début de la trêve et ensuite la libération de la ville de Qaryateine.

“La trêve a été conclue par le biais d’un consensus international en coopération avec l’Etat syrien, mais non pas selon les conditions de la partie américaine qui ferme les yeux sur les agissements des agents saoudiens et turcs dans la région », soulignant que les Saouds avaient proclamé à plusieurs reprises leur soutien au terrorisme et que la Turquie fait entrer publiquement les terroristes par ses frontières qui bordent la Syrie au Nord. Il a déploré que “Le problème réside dans le fait qu’une grande partie du conflit en Syrie est international et régional”. Selon lui, « certaines parties ne se sont pas contentées du terrorisme avec des explosifs et des roquettes, mais également économique par la voie des sanctions imposées à la Syrie et par l’exercice des pressions sur la livre syrienne en vue de faire effondrer l’économie et de mettre le peuple à genoux. “Les dernières mesures monétaires prises ont confirmé les possibilités de faire face aux pressions et de rehausser la valeur de la livre syrienne”, a-t-il assuré, affirmant sa volonté de poursuivre le soutien à la livre syrienne et à l’économie en promouvant des lois qui accélèrent le cycle de l’économie.

Il a ensuite attaqué en termes très rudes le président Erdogan au régime « fasciste » qui se centre toujours sur Alep, qui représente pour lui le dernier espoir pour son plan des Frères Musulmans, dont, paraît-il il serait membre. «Mais, a-t-il poursuivi, Alep restera le cimetière où les espoirs et les rêves de cet assassin seront enterrés ».

Bachar-al-Assad

Bachar el-Assad a alors asséné sous les ovations du Parlement: “Notre guerre contre le terrorisme se poursuit et ne prendra fin qu’après l’éradication du terrorisme où qu’il se trouve. » “De même que nous avons libéré Tadmor (Palmyre), et d’autres zones, nous libérerons chaque pouce de la Patrie des mains des terroristes, car nous n’avons pas d’autre choix que la victoire. Sinon la Syrie disparaîtra et ses citoyens n’auront plus ni présent ni avenir. »

Des termes qui ont inquiété les Américains, comme nous verrons plus loin. Bachar el-Assad a alors de nouveau appelé « tous ceux qui ont porté les armes, quelqu’en  soit la raison, à rejoindre le processus de réconciliations, car la voie du terrorisme n’aboutira qu’à la destruction de la patrie et à la perte de tous les Syriens sans discernement. » Il a grandement loué l’héroïsme de l’armée arabe syrienne et des forces qui l’appuient en disant : «Sans vous, nous n’aurions pas pu résister et nous aurions disparu ». Il a rendu un vibrant hommage, également, à ses alliés: « Le triomphe contre le terrorisme doit inéluctablement se réaliser tant qu’il y a des pays, tels que l’Iran, la Russie et la Chine, qui soutiennent le peuple syrien, ainsi que le droit», a-t-il martelé. (Source principale des citations: agence Sana

Les Etats-unis découragés par la fermeté de ce discours

La fermeté du langage du président syrien qui s’est engagé à reconquérir « chaque centimètre » de son pays a été jugée « décourageante » par les États-Unis:.

Mark Toner, porte-parole du département d’État, a dit mardi que Washington allait appeler la Russie, qui co-dirige avec les États-Unis le Groupe international de soutien à la Syrie (ISSG), à réfréner son allié.

« Nous estimons toujours que la Russie et l’Iran peuvent au moins appeler ceux qui ont toujours une influence sur le régime à le réfréner pour empêcher que le processus politique et la cessation des hostilité ne tombent complètement en morceaux », a dit M. Toner. « Une fois encore il n’y a rien de surprenant dans ce qu’il a dit aujourd’hui mais vous savez, c’est décourageant », a-t-il encore convenu.

Le porte-parole de la Maison Blanche Josh Earnest a quant à lui estimé que l’inflexibilité d’Assad « ne fait qu’exacerber le chaos ». Mais selon lui le président russe Vladimir Poutine a le pouvoir de faire bouger les choses. « Le président Poutine a promis d’user de son influence pour pousser le régime Assad à respecter la cessation des hostilités », a-t-il souligné. (Source: Sputnik)

Le jeu des alliances

Les USA et d’autres pays occidentaux ont trouvé chez les Kurdes les combattants au sol qui leur conviennent, c’est pourquoi ils les aide, non sans que cela n’éveille des difficultés parmi les membres de l’Otan. En effet, Parmi toutes les forces qui combattent en Syrie, c’est la seule qui se réclame de la laïcité. Mais c’est également une force qui divise l’OTAN puisque la Turquie combat le parti Kurde sécessionniste du PKK depuis des dizaines d’années. Ces mêmes kurdes dont la branche armée combat en Syrie, des kurdes qui n’hésitent pas, en réponse au soutien d’Erdogan aux terroristes à revendiquer des attentats sanglants en Turquie. Autre difficulté avec les Kurdes, ils entretiennent des contacts avec le régime syrien. C’est en effet le pouvoir syrien qui a protesté lorsque l’ONU n’a pas invité la partie kurde à la table des négociations à Genève contrairement à ce que demandaient l’Iran, la Russie et la Syrie. La présence kurde aux négociations de Genève embarrasse particulièrement la coalition américaine du Proche-Orient dans laquelle l’OTAN occupe une place de choix. l’Occident qui ainsi se trouve pris entre deux feux antagonistes, celui des kurdes et celui de son allié turc de l’OTAN.

Dés que les États-unis ont engagé leur soutien aux forces syriennes et kurdes dans la bataille de Raqqa, il y a quelques semaines seulement, la Russie a aussitôt proposé son appui. Une proposition de services qui a une fois encore bien embarrassé les USA qui ont été contraints de refuser l’offre. Les objectifs de la Russie sont clairs et sans ambigüité, il s’agit d’éradiquer le terrorisme et de restaurer l’État syrien dans son unité, mais il n’en est pas du tout de même des USA qui  mènent un jeu ambigu avec les islamistes dont ils se réservent les services en cas de besoin, ne serait-ce que pour diviser la Syrie en renversant Bachar el-Assad, affaiblir par tous les moyens cet allié de l’Iran, ce qui est le vœu d’Israël, ainsi que l’a si bien exprimé Hillary Clinton, -soutenue dans sa course à la Maison blanche par Obama-, dans un courriel dévoilé par Wikileaks. Des objectifs qui malgré les événements, restent d’actualité, puisque le 25 mai le département d’Etat américain déclarait encore que la destitution de Bachar el-Assad restait son objectif.

L’affaiblissement de la Syrie par la partition du pays, s’il est ardemment souhaitée par le camp occidentalo-israélien, ne pourra jamais être accepté par la Russie ni par l’Iran. La Russie, qui d’ailleurs, dernièrement vient de nouveau de promettre son soutien à l’armée syrienne à Alep. Suite aux négociations quasiment bloquées à Genève et au rejet par les Américains du concours de la Russie à la bataille de Raqqa, il est fort probable que les Russes vont revenir dans la guerre d’autant plus que leur porte-avion est annoncé en Méditerranée pour le mois de juillet… Il suffit pour cela que les USA s’enferrent de nouveau dans leurs double ou triple jeu, comme ça a été le cas flagrant lorsque la Russie est entrée en guerre pour commencer la conquête du territoire syrien avec l’Armée syrienne. Le porte-avion américain Harry Trumann, lui aussi, devrait parvenir en Méditerranée sous peu, venant du Golfe, un acte que la Russie perçoit comme une agression, alors que des navires américains vont participer aux manœuvres de l’OTAN en mer Noire et auquel la Russie a annoncé qu’elle allait répondre.

Les petits groupes protégés par les Occidentaux, qui combattaient jusque-là à l’ombre du Front al-Nosra,  ont dernièrement manifesté des velléités de coopérer avec la Russie. Ce qui signifie que ces forces qui ne représentaient pas beaucoup sur le terrain mais qui représentaient beaucoup d’un point de vue stratégique anti-Assad pour l’Occident, sont en train d’évoluer. C’est pour permettre à ces groupes de se retirer d’Al-Nosra que la Russie a suspendu quelque temps ses raids aériens en soutien à l’armée syrienne.  Ces petits groupes ont compris que désormais ils n’ont pas d’avenir s’ils restent dans l’ombre d’Al-Nosra. C’est la raison pour laquelle ils essayent aujourd’hui de s’en éloigner… aussi pour leur survie. C’est un élément essentiel qui montre qu’on est vraiment entré dans une période d’affaiblissement d’Al-Nosra, de l’Etat islamique et des islamistes en général. L’offensive lancée par les Forces démocratiques syriennes dans le Nord de Raqqa le montre aussi.

Vers une sortie de la guerre ?

Si l’évolution se poursuit ainsi, tôt ou tard la guerre prendra fin au Moyen-Orient, faute de troupes islamistes pour continuer à jouer le jeu trouble de l’Occident. Les structures étatiques syriennes sont désormais assez fortes pour ne plus craindre un scenario à l’irakienne ou à la libyenne. La Syrie a renforcé ses alliances, ces opposants ont compris qu’ils ne pouvaient pas gagner dans le camp du terrorisme prétendument modéré. Ils sont en train de réviser leur position politique. Le point charnière entre la défaite de l’État syrien et la reconquête correspond à l’intervention russe, efficace, rapide, résolue, sans rodomontades, contre les terroristes. Elle semble avoir porté un rude coup au jeu de poker menteur des USA et de ses alliés après qu’ils aient été forcés de sortir du bois… Mais de ce côté-là le pire n’est jamais exclus; dés le départ fulgurant de la conquête de l’Etat islamique -qui ne date que du 29 juin 2014-, l’Occident s’était empressé d’annoncer que cette guerre était appelée à durer de longues années, ce qui laisse supposer des arrières-pensées très étranges.

emiliedefresne@medias-presse.info

 

 

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