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Au sujet des prochaines consécrations épiscopales dans la FSSPX : une prise de position du district d’Allemagne qui interpelle

Entretien de M. l’abbé Stefan Pfluger pour le die-Tagespos du 24 novembre 2024 par Sebastian Ostritsch

Après le rappel à Dieu de Mgr Bernard Tissier de Mallerais, la nécessité des consécrations épiscopales de nouveaux évêques auxiliaires pour le FSSPX se fait sentir d’une façon plus puissante.

La prière s’élève dans les âmes por aider le Supérieur Général de la Fraternité dans la réalisation prudente de ces sacres.

Si les supplications vers le Ciel sont les bienvenues en cette circonstance, les fidèles de la FSSPX ne peuvent être que surpris et troublés des déclarations  intempestives sur le sujet.

Les prêtres – fussent-ils supérieurs de district – devraient être attentifs à ne pas rendre impraticable le champ des possibles sur lesquels Monsieur l’abbé Davide Pagliarani devra se prononcer.

Il est donc bien malvenu, ce récent billet [Voir l’image ci-dessus et le texte traduit de l’Allemand ci-après], qui défend l’obligation ecclésiastique qu’aurait la FSSPX de demander l’autorisation à l’actuel Pontife de procéder à ces consécrations.

C’est là un point de vue éminemment contestable et qui n’est certainement pas celui de beaucoup de prêtres et de fidèles.

Il paraît fort peu vraisemblable que ledit billet ait été officieusement commandé par le Supérieur Général de la FSSPX.

Lancer des ballons d’essai ne peut être que diviseur.

En conclusion et en réaction audit billet, il n’est pas inutile de se souvenir que le sacre de Monseigneur Licinio Rancel, le 28 juillet 1991, par les quatre évêques consacrés par Monseigneur Lefebvre, s’est fait sans que personne ne s’avise de demander au Pape Jean-Paul II quelque autorisation que ce soit.

Christian LASSALE

Traduction du texte paru dans die-Tagespost.de du 24 novembre 2024 [Sebastian Ostritsch]

Fraternité Saint Pie X – « L’épine dans le pied de l’Eglise officielle »

L’abbé Stefan Pfluger, supérieur du district d’Allemagne de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X (FSSPX), sur le rapport à la hiérarchie, les divergences non résolues du Magistère et le sens de la liturgie traditionnelle.

Monsieur l’abbé, vous êtes en poste en tant que supérieur du district d’Allemagne de la FSSPX depuis 2019. Quels défis particuliers avez-vous rencontré jusqu’à présent ?

La grande difficulté d’un tel poste, c’est qu’il faut un certain temps avant de pouvoir. y faire sa place. En effet, il s’agit d’un district avec 50 prêtres. Il faut donc au moins deux ans avant d’être vraiment en selle. Et les deux premières années ont été fortement marquées par la crise Covid. Pendant cette période, les chapelles de la FSSPX ont pu fonctionner beaucoup plus librement que les paroisses.

Cette situation vous a-t-elle apporté de nouveaux fidèles ?

La difficulté résidait d’une part à appliquer les mesures raisonnables tout en respectant les obligations légales. D’autre part, notre principale préoccupation consistait à permettre aux croyants de continuer à recevoir les sacrements. Ce qui a poussé de nombreux croyants chez nous durant cette période, c’était le fait que nous donnions la communion sur la langue.

Récemment, Monseigneur Tissier de Mallerais, l’un des évêques de la FSSPX, est décédé.  La Fraternité va-t-elle à nouveau tôt ou tard devoir sacrer de nouveaux évêques ? Nous avons actuellement encore deux évêques auxiliaires. Or on ne peut séparer la question fondamentale de l’existence de la FSSPX de la question des évêques. Le fait que notre fondateur, Monseigneur Marcel Lefebvre, ait sacré nos propres évêques en 1988 était nécessaire, car on nous avait isolé du fait de notre maintien de la liturgie traditionnelle et de notre refus de reconnaître certains points de la proclamation officielle selon Vatican II. D’autre part, les croyants qui viennent à nous et qui sont préoccupés, à juste titre, par la question des ordinations épiscopales, doivent comprendre que des ordinations épiscopales ne se font pas comme ça. Pour arriver à cet ultime recours, l’état de nécessité doit être évident. Tout le reste serait totalement contraire à l’esprit de l’Église. Et cela fait également parDe de l’esprit de l’Église, que nous mettrons tout en oeuvre afin que Rome donne son consentement pour d’éventuelles ordinations épiscopales. La hiérarchie doit comprendre que nous ne construisons pas une contre-hiérarchie. Nous ne voulions pas nous séparer de Rome, nous appartenons à l’Église. Nos évêques sont de purs évêques auxiliaires qui sont là pour assurer l’administration des sacrements et des ordres dans nos paroisses et nos séminaires.

L’accusation selon laquelle la FSSPX est schismatique n’est plus très courante aujourd’hui. On dit généralement que la Fraternité n’est pas en pleine communion avec Rome. Comment voyez-vous cela ?

Comment peut-on être partiellement, mais pas totalement en communion ? Cela ne me semble pas clair. À mon avis, on jette ainsi du sable aux yeux du monde catholique. Je n’ai encore jamais entendu, de la part d’un dignitaire de l’Église ou d’un spécialiste du droit canon, ce qui nous ferait défaut pour ne pas être en pleine communion.

Outre les ordinations non autorisées d’évêques, ne s’agit-il pas avant tout du rejet sélectif de certains documents de l’enseignement de Vatican II ?

Ce sont des points sur lesquels nous disons : le Concile Vatican II n’est pas en continuité avec l’intégralité du passé de l’Église. À ce sujet, Monseigneur Lefebvre avait déclaré : que se passe-t-il si le Pape dit quelque chose de différent que tous ses prédécesseurs ? Dans ce cas, je dois prendre une décision. Et je choisis les prédécesseurs. Néanmoins, nous ne pouvons que souligner que nous nous considérons comme subordonnés au Pape. Cela va si loin que nous excluons les personnes qui défendent des thèses sédévacantistes, ce qui dont le passé a parfois mené à de grandes pertes pour la Fraternité.

Mais la désobéissance constante ne montre-t-elle pas qu’on ne reconnait pas vraiment le Pape ?

Non, parce que nous ne désobéissons pas par principe et que nous ne sommes pas fondamentalement désobéissants. Je ne peux que rappeler ce que Monseigneur Lefebvre a souligné à plusieurs reprises : l’obéissance est au service de la vérité. Le ministère de Pierre n’est pas une monarchie absolutiste, mais au service de la vérité, au service du Christ, au service de l’Église. Nous n’avons le droit de violer l’obéissance au Pape, hormis lorsque cela est nécessaire pour ne pas trahir le service du Christ et de l’Église.

Parlons de la liturgie. Il y a 40 ans, Jean-Paul II a publié l’indult « Quatuor abhinc annos », qui donnait au évêques diocésains le pouvoir de faire célébrer la messe dans leurs diocèses selon le Missel romain de 1962.

En ce qui concerne l’indult, il ne permettait en principe de célébrer la messe tridentine qu’à ceux qui démontraient ne pas devoir en dépendre dans l’absolu. La condition suivante d’appliquait : il doit être publiquement établi que le prêtre et les fidèles reconnaissent et approuvent la validité de la messe Paul VI. Ainsi dégrade-on ceux qui veulent l’ancienne messe à des sentimentalises nostalgiques, à une sorte de « fan club de voitures de collection ».

Considérez-vous alors la nouvelle messe comme invalide ?

Chez nous, personne n’a jamais contesté que le Novus Ordo soit intrinsèquement valide. Il s’agit cependant d’un rite qui – bien que formellement valide – ne répond pas aux exigences essentielles d’un rite catholique. La nouvelle liturgie n’exprime plus les vérités essentielles de la foi, notamment le caractère de l’expiation. Il est également important de prendre en compte l’apostasie désastreuse observée depuis l’introduction du Novus Ordo. À mon avis, cela montre clairement que ce rite de messe, bien que valable et approuvé par le Pape, est tellement déficient qu’il nuit aux âmes. Et c’est pourquoi nous refusons de le célébrer. En dehors de cela, personne de notre côté ne refuse fondamentalement la possibilité au Pape d’introduire un nouveau rite. La question est plutôt : peut-il interdire l’ancien ?

Venons-en aux disputes doctrinales. La FSSPX s’oppose aux déclarations du Concile Vatican II sur l’oecuménisme, la collégialité des évêques et la liberté religieuse. La Fraternité Saint Pierre (FSSP), également engagée dans la préservation de la liturgie tridentine, reconnaît pleinement le Concile et représente, à la suite de Benoît XVI, une « herméneutique de la continuité ». La FSSPX ne reflète-t-elle pas, par inversion, la position de ces progressistes qui veulent provoquer une rupture radicale dans l’enseignement de l’Eglise en faisant référence à un sinistre « esprit du Concile » ?

Je pense qu’il faut examiner attentivement les différents documents et les distinguer : on peut accepter sans réserve ce qui est catholique. Si quelque chose n’apparaît pas comme clairement catholique, nous devons l’interpréter d’un point de vue catholique, même si d’autres l’interprètent différemment. Mais la pierre d’achoppement réside dans les passages qui, selon nous, ne peuvent être interprétés de manière catholique, parce qu’ils contredisent les Saintes Écritures et l’enseignement traditionnel de l’Église. Prenons le cas de la liberté religieuse. La question de la liberté religieuse est le plus souvent très mal comprise, avant tout dans les médias, où l’on pense que les opposants à la liberté religieuse préconisent une contrainte à la religion, ce qui n’est absolument pas le cas. Il a de tout temps été mal vu et interdit de forcer quiconque à devenir catholique. La question est : l’État a-t-il un devoir envers Dieu ? Et le point de vue moderne est très clair : non. La vision traditionnelle, cependant, dit que l’État doit également garder un oeil sur le but ultime et surnaturel des hommes et les soutenir en vue de cette fin.

Mais n’y a-t-il pas une position intermédiaire, selon laquelle l’État a le devoir de veiller également au bien surnaturel de ses citoyens, mais qu’il n’est néanmoins pas autorisé à les restreindre dans la pratique de fausses religions ?

Le document initialement préparé au Concile était en fait « De toleranda religiosa », c’est-à-dire « Sur la tolérance religieuse », et non « De Libertate religiosa », c’est-à-dire « Sur la liberté religieuse ». La tolérance est le maître mot : on tolère un mal. L’erreur, quelle qu’elle soit, n’a pas le droit d’exister, même si on peut la tolérer. L’idée moderne de liberté religieuse veut pourtant accorder un droit à l’erreur.

Mon impression est la suivante : la FSSPX s’est accommodée de son rôle particulier et poursuit sa route avec succès. Y a-t-il encore une raison quelconque de lutter pour la réconciliation avec Rome ?

Dès l’instant où nous nous retirons dans notre cocon, nous renonçons à être catholiques. Comment aurions-nous donc voulu poursuivre la mission du Christ, comment aurions-nous alors voulu conduire les âmes au Christ ? Je crois qu’il est de notre devoir d’être l’épine dans le pied de l’Église officielle, de la perturber un peu, non pas en polémisant ou en agissant comme un protestataire, mais simplement par notre présence et notre travail missionnaire.

Source de l’original : https://www.die-tagespost.de/kirche/aktuell/der-stachel-im-fleisch-der-amtskirche-art-257835

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