Voici un communiqué de la Cellule juridique de Civitas qui mérite toute notre attention.

Point sur les isolements imposés par l’administration et sur ce qu’il faut attendre des juges en général

Quand on se connecte sur le site de l’assurance maladie, on s’aperçoit qu’elle a publié l’information selon laquelle il existe un confinement obligatoire pour les cas contact d’une personne contaminée par le nouveau variant Omicron : https://www.ameli.fr/assure/covid-19/symptomes-gestes-barrieres-cas-contact-et-isolement/en-cas-de-contact-avec-une-personne-malade-du-covid-19

Or, cet isolement n’a jamais été obligatoire contrairement à ce qu’indique l’assurance maladie et ce que le premier ministre et le ministre de la santé ont indiqué encore hier.

Il s’agissait d’ailleurs de l’une des seules mesures qui avait été déclarée inconstitutionnelle par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2021-824 DC du 5 août 2021.

Nous citons :

«112. Les dispositions contestées prévoient que, jusqu’au 15 novembre 2021 et aux seules fins de lutter contre la propagation de l’épidémie de covid-19, toute personne faisant l’objet d’un test positif à la covid-19 a l’obligation de se placer à l’isolement pour une durée non renouvelable de dix jours. Dans ce cadre, il est fait interdiction à la personne de sortir de son lieu d’hébergement, sous peine de sanction pénale.

113. Ce placement en isolement s’appliquant sauf entre 10 heures et 12 heures, en cas d’urgence ou pour des déplacements strictement indispensables, il constitue une privation de liberté.

114. En adoptant ces dispositions, le législateur a poursuivi l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé.

115. Toutefois, les dispositions contestées prévoient que toute personne qui se voit communiquer le résultat positif d’un test de dépistage à la covid-19 a l’obligation, sous peine de sanction pénale, de se placer à l’isolement pour une durée de dix jours, sans qu’aucune appréciation ne soit portée sur sa situation personnelle.

116. Or, d’une part, cette obligation n’est portée à sa connaissance qu’au seul moyen des informations qui lui sont communiquées au moment de la réalisation du test. D’autre part, l’objectif poursuivi par les dispositions contestées n’est pas de nature à justifier qu’une telle mesure privative de liberté s’applique sans décision individuelle fondée sur une appréciation de l’autorité administrative ou judiciaire.

117. Dès lors, bien que la personne placée en isolement puisse solliciter a posteriori un aménagement des conditions de son placement en isolement auprès du représentant de l’État dans le département ou solliciter sa mainlevée devant le juge des libertés et de la détention, les dispositions contestées ne garantissent pas que la mesure privative de liberté qu’elles instituent soit nécessaire, adaptée et proportionnée. »

118. Par conséquent, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs, l’article 9 de la loi est contraire à la Constitution. »

Fort de cette jurisprudence, la Ligue de défense pour les libertés politiques et naturelles, conseillée par la cellule juridique de Civitas, a déposé un recours devant le Conseil d’Etat.

Sans surprise, le Conseil d’Etat a rejeté le recours présenté non en légitimant ces isolements mais en indiquant qu’ils n’ont jamais été obligatoires. L’assurance maladie, les ministres et la presse apprécieront.

Voici ce qu’indique le Conseil d’Etat dans son ordonnance du 24 décembre n°459542 :

Conclusion : le Conseil d’Etat sauve une fois de plus l’Etat en indiquant qu’une mesure présente sur le site de l’assurance maladie, dans la bouche de nos ministres et dans la presse n’existe pas.

Cette décision pourra tout de même servir à quiconque qui se verra à l’heure actuelle menacé par l’assurance maladie pour ne pas respecter un tel isolement.

Toutefois, le projet de loi qui sera certainement voté à la fin du mois de janvier prévoit une modification en son article 2 de l’article 11 de la loi n° 2020 546 du 11 mai 2020 (https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b4857_projet-loi ).

Si la mesure passe, l’administration pourra isoler « légalement » des administrés et les contraindre s’ils sont positifs ou cas contact sous réserve que l’état d’urgence sanitaire soit déclaré, ce qui n’est actuellement le cas qu’à la Réunion. Techniquement, elle le pouvait déjà mais les modifications permettront de le faire beaucoup plus facilement.

Même s’il n’y a toujours pas de contrôle du juge, il est fort probable que cette décision passe devant le Conseil constitutionnel.

En effet, certains pourraient se demander ce qu’il faut désormais attendre du Conseil d’Etat et du Conseil constitutionnel. La réponse est : « rien ». Si avant le vaccin, les juges ont pu nous donner quelques victoires que nous avons relayées ici, il est désormais improbable que cela arrive à nouveau avant plusieurs mois.

Le Conseil d’Etat et le Conseil constitutionnel sentent que l’Etat est menacé et pensent qu’ils doivent faire bloc derrière lui pour éviter à la nation de se désagréger. Ils ne condamnent pas l’Etat comme ils auraient pu le faire dans cette ordonnance sur les isolements de peur de créer un précédent et d’affaiblir un exécutif déjà exsangue. Au surplus, ils ont également peur d’être tenu pour responsable du moindre décès en réanimation et que l’Etat se décharge sur eux à cette occasion.

Pour ces deux raisons, les juges ne bougeront pas.

Toutefois, il faut rester confiant, plus cette crise dure, plus elle nous donne raison. Plus nous voyons l’imbécilité de certaines mesures prises par l’exécutif. Le vent de l’opinion public tournera et comme toujours dans ces moments, le Conseil d’Etat voudra se trouver du bon côté de l’histoire. Il faudra à ce moment-là se tenir prêt.

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