Sanctoral 

XV° dimanche après la Pentecôte : « Celui qui ressuscite les morts.»

L’épisode si touchant de la veuve de Naïm donne aujourd’hui son nom au quinzième Dimanche après la Pentecôte. L’Introït nous présente la forme des prières que nous devons adresser au Seigneur dans tous nos besoins. L’Homme-Dieu a promis, Dimanche dernier, d’y pourvoir toujours, à la condition d’être servi par nous fidèlement dans la recherche de son royaume. En lui adressant nos supplications, montrons-nous confiants dans sa parole, comme il est juste de l’être, et nous serons exaucés. L’humilité de l’Église dans les supplications qu’elle adresse au Seigneur est pour nous un exemple. Si l’Épouse en use ainsi avec Dieu, quelles ne doivent pas être nos dispositions d’abaissement quand nous paraissons en présence de la souveraine Majesté ? Nous pouvons bien dire à cette tendre Mère, comme les disciples au Sauveur : Montrez-nous à prier ! Unissons-nous à elle dans la Collecte.

ÉPÎTRE. La sainte Église reprend la lecture de saint Paul où elle l’avait laissée il y a huit jours. C’est la vie spirituelle, la vie produite par l’Esprit-Saint dans nos âmes pour remplacer celle de la chair, qui continue d’être l’objet des instructions apostoliques. La chair une fois domptée, nous ne devons pas croire achevé pour cela l’édifice de notre perfection ; outre que la lutte doit continuer après la victoire, sous peine d’en voir compromettre les résultats, il faut veiller à ce que l’une ou l’autre des têtes de la triple concupiscence ne profite point du moment où l’effort de l’âme est porté ailleurs, pour se redresser, et faire des blessures d’autant plus dangereuses souvent qu’on songerait moins à s’en préserver. La vaine gloire principalement, toujours prête à infecter de son venin subtil jusqu’aux actes eux-mêmes de l’humilité et de la pénitence, demande à l’homme qui veut servir Dieu, et non se plaire à lui-même dans sa vertu, une surveillance des plus actives. Quelle folie ne serait-ce pas à un condamné racheté par la flagellation de la peine capitale qu’il avait méritée, de se glorifier des coups marqués dans sa chair par le fouet à châtier les esclaves ? Que cette folie ne soit jamais la nôtre ! Il parait bien cependant qu’elle pourrait l’être, puisque l’Apôtre fait suivre immédiatement ses avis sur la mortification des passions de la recommandation d’éviter la vaine gloire. Et en effet, nous ne serons assurés pleinement de ce côté, qu’autant que l’humiliation physique infligée au corps aura chez nous pour principe l’humiliation réfléchie de l’âme devant sa misère. Les anciens philosophes avaient, eux aussi, des maximes sur la répression des sens ; et la pratique de ces maximes célèbres était le marchepied dont s’aidait leur orgueil pour s’élever jusqu’aux cieux. C’est qu’ils étaient loin en cela des sentiments de nos pères dans la foi, lesquels, sous le cilice et prosternés en terre, s’écriaient du fond de l’humaine bassesse, dans l’intime de leur cœur : « Ayez pitié de moi, ô Dieu, selon votre grande miséricorde ; car j’ai été conçu dans l’iniquité et mon péché est toujours devant moi. » Imposer des souffrances au corps pour en tirer vanité, qu’est-ce autre chose que ce que saint Paul appelle aujourd’hui semer dans la chair, pour récolter au temps venu, c’est-à-dire au jour où seront manifestées les pensées des cœurs, non la gloire et la vie, mais la confusion et la honte éternelle ? Parmi les œuvres de la chair énumérées dans l’Épître précédente se trouvent, en effet, non seulement les actes impurs, mais encore les contentions, les dissensions, les jalousies, qui naissent trop souvent de cette vaine gloire sur laquelle l’Apôtre appelle en ce moment notre attention. La production de ces fruits détestables serait un signe trop certain que la sève de la grâce aurait fait place à la fermentation du péché dans nos âmes, que, redevenus esclaves, il nous faudrait compter avec la loi et ses sanctions terribles. On ne se moque pas de Dieu ; et la confiance que donne justement à quiconque vit de l’Esprit la fidélité surabondante de l’amour, ne serait plus, dans ces conditions, qu’une contre-façon hypocrite de la liberté sainte des fils du Très-Haut. Car ceux-là seuls sont ses enfants que l’Esprit-Saint conduit dans la charité ; les autres sont dans la chair, et ne peuvent plaire à Dieu. Si nous voulons au contraire un signe non moins certain sous les obscurités de la foi que l’union divine est notre partage, au lieu de prendre occasion, pour nous enfler vainement, des défauts et des fautes de nos frères, soyons indulgents pour eux dans la considération de notre propre misère ; tendons-leur, quand ils tombent, une main secourable et discrète ; portons mutuellement nos fardeaux dans le chemin de la vie : et alors, ayant t ainsi rempli la loi du Christ, nous saurons que NOUS DEMEURONS EN LUI ET LUI EN NOUS. Car ces ineffables paroles employées par Jésus pour marquer son intimité future avec quiconque mangerait la chair du fils de l’homme et boirait son sang au banquet divin, saint Jean qui les avait rapportées les reprend mot pour mot, dans ses Épîtres, afin d’en faire l’application à quiconque observe dans l’Esprit-Saint le commandement de l’amour des frères. Oh ! Puisse-t-elle donc résonner sans cesse à nos oreilles cette parole de l’Apôtre : Tandis que nous en avons le temps, faisons du bien à tous ! Car un jour viendra, qui n’est plus éloigné, où l’ange portant le livre mystérieux, un pied sur la terre et l’autre sur la mer, fera retentir dans les espaces sa voix puissante comme celle du lion, et, la main levée au ciel, jurera par Celui qui vit dans les siècles sans fin que le temps n’est plus ! C’est alors que l’homme recueillera dans l’allégresse ce qu’il avait semé dans les larmes ; il ne s’était point lassé de faire le bien dans les ténébreuses régions de l’exil, il se lassera moins encore de récolter sans fin dans la vivante lumière du jour éternel. Pensons, en chantant le Graduel, que si la louange agrée au Seigneur, c’est à la condition de s’élever d’une âme où règne l’harmonie des vertus. La vie chrétienne, réglée sur les dix commandements, est le psaltérion à dix cordes d’où le doigt de Dieu, qui est l’Esprit-Saint, fait monter vers l’Époux des accords qui ravissent son cœur.

ÉVANGILE. C’est la seconde fois que la sainte Église présente l’Évangile qu’on vient d’entendre à nos méditations, et nous ne devons pas nous en étonner ; car les Pères choisis par elle pour en donner l’interprétation nous apprennent, dans les deux circonstances, que cette mère désolée qui suit en pleurs le convoi de son fils est l’Église même. Nous la vîmes une première fois apparaître à nos yeux, sous ce touchant symbole, dans les jours consacrés à la pénitence quadragésimale, lorsqu’elle préparait par ses jeûnes, unis aux souffrances de l’Époux, la résurrection de ceux de nos frères qui étaient morts et que nous pûmes voir ensuite s’asseoir près de nous pleins de vie au banquet de la Pâque. Quelles ne furent pas, en ce grand jour, les joies maternelles s’unissant dans son cœur aux allégresses de l’Épouse ! Car, du même coup, Jésus, doublement vainqueur de la mort, mettait fin à son veuvage en sortant du tombeau et lui rendait ses fils. Et les disciples de Jésus qui le suivent de plus près en s’attachant à sa personne dans la voie des conseils, et toute la foule accompagnant l’Église chantaient à l’envi ces étonnants prodiges et célébraient la visite de Dieu à son peuple. La Mère ne pleurait plus. Mais, depuis, l’Époux a disparu de nouveau, remontant vers son Père ; l’Épouse a repris les sentiers du veuvage, et les souffrances de son exil s’accroissent chaque jour immensément. Car des pertes nombreuses n’ont point tardé de se produire parmi les fils ingrats qu’elle avait engendrés, une seconde fois, dans la douleur et les larmes. Ces soins multipliés naguère autour des pécheurs, cet enfantement nouveau sous l’œil de son Époux expirant avaient fait de chacun d’eux, dans la grande semaine, comme l’enfant unique de l’Église. Combien, après la communion de tels mystères, dit saint Jean Chrysostome, n’est-il pas douloureux pour sa tendresse de les voir retourner d’eux-mêmes au péché qui les tue ! « Épargnez-moi, » a-t-elle bien droit de dire selon la parole que le saint Docteur met en la bouche de l’Apôtre : « quel autre enfant, une fois au monde, vient imposer derechef de telles douleurs au sein maternel ? » Car les chutes des fidèles, pour être réparées, ne lui causent pas un moindre travail que l’enfantement de ceux qui n’ont pas cru encore. Et si nous comparons nos temps à cet âge où la bouche des pasteurs faisait entendre par tout l’univers ses accents respectés, est-il un seul des enfants restés fidèles à l’Église, qu’un tel rapprochement ne pousse à se serrer davantage autour d’une Mère si outrageusement délaissée ? « Resplendissante alors de tout l’éclat des joyaux spirituels dont l’Époux l’avait ornée au jour de ses noces, dit saint Laurent Justinien, elle tressaillait de l’accroissement de ses fils en vertu comme en nombre, les appelant à monter plus haut toujours, les offrant à son Dieu, les portant dans ses bras jusqu’aux cieux. Obéie d’eux, elle était bien la mère du bel amour et de la crainte , belle comme la lune, éclatante comme le soleil, terrible comme une armée rangée en bataille. Comme le térébinthe elle étendait ses rameaux, et, sous leur ombre, protégeait ceux qu’elle avait engendrés contre la chaleur du jour, la tempête et la pluie. Tant qu’elle put donc elle travailla, nourrissant dans son sein tous ceux qu’elle parvenait à rassembler. Mais son zèle, tout incessant qu’il fût, a redoublé depuis qu’elle en a vu plusieurs, et des multitudes, abandonner la ferveur première. Depuis nombre d’années, elle gémit en voyant s’étendre chaque jour l’offense de son Créateur, ses propres pertes et la mort de ses fils. Celle qui se revêtait de pourpre a pris la robe de deuil, et ses parfums n’exhalent plus leur odeur ; une corde a remplacé sa ceinture d’or, on ne voit plus sa brillante chevelure, et le cilice tient lieu d’ornement sur son sein. Aussi ne peut-elle arrêter maintenant ses lamentations et ses pleurs. Sans cesse elle prie, cherchant si par quelque manière elle n’arrivera point à retrouver dans le présent sa beauté passée, quoiqu’elle défaille presque en sa supplication, regardant comme impossible de redevenir ce qu’elle était. La parole prophétique s’est accomplie pour elle : Tous ils se sont détournés de la voie, ensemble ils sont devenus inutiles ; il n’y en a point qui fassent le bien, il n’y en a pas même un seul !… Les œuvres multipliées par les enfants de l’Église contre les préceptes divins montrent bien, dans ceux qui les font, des membres pourris et étrangers au corps du Christ. L’Église, cependant, se souvient de les avoir engendrés dans le bain du salut ; elle se souvient des promesses par lesquelles ils s’étaient engagés à renoncer au démon, aux pompes du siècle et à tous les crimes. Elle pleure donc leur chute, comme étant leur vraie mère, et elle espère toujours obtenir leur résurrection par ses larmes. O quelle pluie de larmes est répandue ainsi tous les jours en présence du Seigneur ! que de prières ferventes cette vierge très pure envoie, parle ministère des saints anges, au Christ salut des pécheurs ! Elle crie dans le secret des cœurs, dans les retraites isolées, comme dans ses temples au grand jour, afin que la divine miséricorde rappelle à la vie ceux qui sont ensevelis dans le bourbier des vices. Qui dira son intime allégresse, quand elle reçoit vivants ceux qu’elle pleurait comme morts ? Si la conversion des pécheurs réjouit tellement le ciel, combien aussi la Mère ! Selon la mesure de la douleur qu’elle avait conçue de leur perte, la consolation déborde alors en son cœur. » Chrétiens préservés de la défection par la miséricorde du Seigneur, il nous appartient de compatir aux angoisses de l’Église, et d’aider en tout les démarches de son zèle pour sauver nos frères. Il ne peut nous suffire de n’être point de ces fils insensés qui sont la douleur de leur mère et méprisent le sein qui les a portés. Quand nous ne saurions pas de l’Esprit-Saint lui-même que c’est thésauriser que d’honorer sa mère le souvenir de ce que lui a coûté notre naissance nous porterait assez à ne manquer aucune occasion de sécher ses pleurs. Elle est l’Épouse du Verbe, aux noces duquel prétendent aussi nos âmes ; s’il est vrai que cette union soit la nôtre également, prouvons-le comme l’Église, en manifestant dans nos œuvres l’unique pensée, l’unique amour que communique l’Époux dans ses intimités, parce qu’il n’en est point d’autre en son cœur : la pensée de la gloire de son Père à restaurer dans le monde, l’amour des pécheurs à sauver.

Chantons avec l’Église, dans l’Offertoire, ses espérances réalisées ; que notre bouche ne reste jamais muette devant les bienfaits du Seigneur. Confions-nous, dans la Secrète, à la garde toute-puissante des divins Mystères. La parole de Jésus rappela du trépas le fils de la veuve de Naïm ; sa chair est la vie du monde dans le pain sacré que chante l’Antienne de la Communion. L’union divine ne sera parfaite en nous, qu’autant que le Mystère d’amour dominera tellement nos âmes et nos corps qu’ils en soient possédés pleinement, ne trouvant plus leur direction qu’en lui, non dans la nature. C’est ce qu’explique et demande la Postcommunion.

Saint Maurille, Évêque d’Angers

Saint Maurille, né aux environs de Milan, fut attiré à Tours par les vertus de saint Martin, auprès duquel il exerça pendant plusieurs années les fonctions de chantre aux divins offices; puis, élevé à la prêtrise, il se dévoua au salut des âmes. Son zèle le conduisit près d’Angers, où, par ses prières, il fit descendre le feu du ciel sur un temple païen, et construisit ensuite à la place une église de Jésus-Christ. Il bâtit même à côté un monastère; bientôt vint se fixer alentour une population qui donna naissance à la ville de Chalonne. A la mort de l’évêque d’Angers, Maurille lui succéda, par le choix de saint Martin lui-même. Au jour de sa consécration, une colombe descendit visiblement sur sa tête. Quelques années plus tard, un fait étrange arriva. Pendant la consécration de la Messe célébrée par le pontife, on apporta en toute hâte un enfant mourant, pour qu’il reçut la Confirmation; le Saint attendit la fin du Sacrifice, mais pendant ce temps l’enfant mourut, et Maurille en conçut un si grand chagrin, qu’il s’enfuit sans avertir personne et s’embarqua pour l’Angleterre, où il se gagea comme jardinier chez un riche seigneur. Ses diocésains, dont la douleur était inconsolable, le firent si bien rechercher, qu’on découvrit sa retraite; mais il refusa de revenir au milieu de son troupeau, disant: « Je ne puis; car ayant perdu sur mer les clefs des reliques de ma cathédrale, que j’avais emportées par mégarde, j’ai fait serment de ne plus paraître à Angers avant de les avoir retrouvées. – Les voici, lui dirent les envoyés; pendant notre traversée, un poisson fut jeté sur le pont du navire par la vague, et dans son ventre on a trouvé ces clefs. » Maurille obéit à la Volonté du Ciel. A son retour, il se fit conduire au tombeau de l’enfant, et, les yeux baignés de larmes, il demanda à Dieu de lui rendre la vie. Le petit ressuscité reçut, à cause de cette seconde naissance, le nom de René, et fut le successeur de Maurille sur le siège d’Angers.

Martyrologe

 A Alexandrie, l’anniversaire du bienheureux Philippe, père de la vierge sainte Eugénie. Après avoir renoncé à la dignité de Préfet d’égypte, il reçut la grâce du baptême, et le préfet Térence, son successeur, le fit égorger pendant qu’il était en prière. De plus, les saints martyrs Macrobe et Julien, qui souffrirent sous Licinius.

Le même jour, saint Ligoire martyr. Il fut, pour la foi du Christ, mis à mort par les païens, dans le désert où il vivait.

A Alexandrie, saint Euloge évêque, illustre par sa science et sa sainteté.

A Angers, en Gaule, l’évêque saint Maurille que d’innombrables miracles ont rendu célèbre.

A Sens, saint Amé, évêque et confesseur.

Au monastère de Remiremont, en France, saint Amé, prêtre et abbé, célèbre par son abstinence et le don des miracles.

Le même jour, saint Vénère confesseur, homme d’une admirable sainteté, qui mena la vie érémitique dans l’île de Palmaria.

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