Un rapport du Sénat qui date de 1879 établissant le 14 juillet comme jour de fête nationale de la République française affirme que « ce jour de 14 juillet de 1789 est le plus beau jour de l’histoire de France, et peut-être de toute l’histoire »[1]. Vouloir accommoder l’Histoire aux fantaisies des gouvernements sectaires héritiers du jacobinisme orthodoxe c’est mépriser le jugement des siècles et c’est surtout s’attaquer à la Vérité.

L’étude historique et philosophique du traumatisme que le 14 juillet provoqua dans l’histoire de l’humanité nous fait affirmer que ce jour représente le début de la Fin du royaume de Dieu sur la terre, le début de la Fin de l’ordre naturel dans la vie des hommes.

Saint Thomas d’Aquin affirme que le concept d’ordre naturel désigne la relation d’un sujet ou d’un élément à un principe.[2] Il s’agit dans ce sens de la relation naturelle de la créature au Créateur dit en effet d’origine et de fin.[3] D’origine car c’est Dieu qui crée sa créature et de fin car « Dieu est la fin ultime et extrinsèque de la créature ».[4] Ce type de relations d’ordre théocentrique n’implique pas une relation réciproque entre le Créateur et sa créature, mais strictement une relation unilatérale, réelle et nécessaire de la part de la créature envers son Créateur.[5] Pour autant, c’est la créature qui doit se soumettre à son Créateur, tout en suivant son exemple.

Mais, plus précisément, voyons comment cet ordre naturel s’est transposé dans l’histoire.

Au niveau religieux, l’ordre naturel est représenté par la Cité de Dieu. Selon saint Augustin, « l’amour de la créature pour son Créateur jusqu’au mépris de soi construit la Cité de Dieu». Par ailleurs, cet amour envers son Créateur pourrait inclure deux autres amours qui sont intrinsèquement liés avec ce dernier. Il s’agit de l’amour envers le Créateur biologique (la Famille) et l’amour envers la terre où on est né (la Patrie). Ces trois amours envers le Père Spirituel –Dieu, envers le Père biologique –La Famille et envers notre terre –La Patrie forment cette Civitate Dei. Et c’est ainsi qu’une certaine construction identitaire chrétienne s’opère progressivement à travers ce triple amour envers Dieu, la Famille et la Patrie.

Au niveau politique, cet ordre naturel prend naissance à travers le baptême de Clovis, ce jeune roi qui scella à jamais le destin de sa Patrie avec Dieu. Le baptême de Clovis donna ainsi naissance au premier État barbare catholique fondé sur les ruines de l’Empire Romain et fit de la France la fille aînée de l’Église  et de ses souverains les Rois très Chrétiens.[6] C’est dans ce pacte que naquit l’alliance de l’autel et du trône. Et c’est toujours à travers ce pacte que ce Rex Francorum commença à incarner ces principes transcendants pour la fin de la créature qu’est Dieu. La conséquence naturelle du baptême de Clovis fut le sacre des rois[7] qui renforça encore plus l’idée d’une certaine naturalité politique voulue par le Créateur pour ses créatures. Cette naturalité dans la politique fut cimentée des siècles plus tard par sainte Jeanne d’Arc à travers la triple donation qu’elle fit devant le notaire : « Notaire ! Écrivez, dit la Pucelle inspirée : le 21 juin à 4h du soir, l’an de Jésus-Christ de 1429, le roi Charles VII donne son royaume à Jeanne. Écrivez encore : Jeanne donne à son tour la France à Jésus-Christ. Nos Seigneurs, dit-elle d’une voix forte, à présent c’est Jésus-Christ qui parle : Moi, Seigneur éternel, je la donne à Charles VII »[8].

Cette émouvante triple donation devant notaire nous rappelle que c’est le Christ le Roi de France et le monarque est son lieutenant. Que l’on veuille reconnaître ou non, la fonction royale est intimement liée à la réalisation politique de l’ordre naturel. Ceci résulte aussi du second verset du sacre : le roi promet à son peuple de le gouverner selon les règles de la morale chrétienne, à savoir paix, justice, miséricorde, mais pour y arriver, il doit d’abord façonner son comportement en imitant les vertus du Christ.[9]

Si au niveau politique, l’ordre naturel se traduit pat l’union de l’autel et le trône, au niveau historique il connaît sa splendeur à travers le Moyen Âge. Un professeur d’université espagnol disait que «le Moyen Âge c’est ce que fit de lui la foi catholique». Cette foi catholique se reflète dans l’architecture gothique qui représente l’expression la plus sublime de l’âme chrétienne. À travers les cathédrales gothiques, la créature veut toucher le sublime, veut montrer son souhait naturel d’aller vers le Haut, vers son Créateur.  Cette même ardeur catholique fonde au Moyen Âge les premières universités de l’Europe et c’est l’Église Catholique qui associe l’enseignement supérieur des créatures à leur Créateur et à ses enseignements (la théologie).

Au niveau social, cette naturalité se traduit par une hiérarchie en forme pyramidale qui tend aussi vers le Haut. Au sommet de la pyramide se trouvent ceux qui luttent (la noblesse du sein de laquelle est choisi le lieutenant de Dieu), suivis par ceux qui prient (l’Église) et ceux qui travaillent. C’est toujours au nom de cette relation unilatérale entre la créature et son Créateur que l’Église décide de civiliser la noblesse à partir du IXe siècle en lui donnant comme raison d’être la défense de la Chrétienté. Dans ce sens, l’Église approche le chevalier laïc (miles saecularis) préoccupé par les vanités du monde au chevalier de Dieu (miles Christi) préoccupé par la défense de Dieu. Et c’est, précisément, dans la cérémonie d’adoubement du chevalier où se reflète clairement l’influence de l’Église car « on donne l’épée en forme de croix au chevalier pour lui rappeler que tout comme Jésus-Christ a donné sa vie sur la croix pour nos péchés, de la même façon le chevalier doit vaincre les ennemis de la croix à travers l’épée»[10]. Et encore une fois, le but de la créature, dans ce cas de la noblesse, c’est la défense de son Créateur.

À travers les siècles cet ordre naturel créa une identité chrétienne et nationale basée sur l’union de l’autel et le trône, sur une hiérarchie sociale bien définie dans laquelle la noblesse devint le bras armé de Dieu et sur une loi universelle de la famille caractérisée par l’indissolubilité du lien conjugal.

1789. C’est le 14 Juillet qu’eut lieu le début de la fin de cet ordre naturel voulu par Dieu. Dans ce sens, l’union sacrée entre l’autel et le trône fut le premier objectif des révolutionnaires en vertu de sa raison d’être qu’était la défense de Dieu. Sachant que « le but de la Révolution était de détruire de fond en comble l’édifice du Christianisme et de reconstruire sur ses ruines l’ordre social du paganisme », pour y arriver, le trône, défenseur de l’Église, devait être mis à bas. C’est ce qui advint à travers l’assassinat du Roi : « le roi Louis XVI a été assassiné car il était le roi oint à Reims ». Pour pouvoir construire « l’ordre social du paganisme », ils devaient chasser le baptême de Clovis qui marqua la victoire du catholicisme sur le monde païen ainsi que sa continuation naturelle – le sacre – qui renforça l’idée de protection de l’Église à travers notamment les luttes contre l’invasion musulmane en Europe, les croisades de saint Bernard ou les luttes contre l’hérésie satanique du protestantisme. L’oraison du sacre au moment où l’archevêque de Reims ceint le Roi avec le glaive est claire : « Sire, prenez cette épée qui vous est donnée avec la bénédiction de Dieu, par lequel en la vertu du Saint Esprit, résister et repousser  tous vos ennemis et tous les adversaires de la Sainte Église Catholique… » Mais cette haine de Dieu ne s’acheva pas car la reine était encore en vie et le 16 octobre 1793  on va la coucher sur la planche de l’échafaud et dans un roulement de tambour, la monarchie disparut définitivement. Tant que Marie-Antoinette vivait, il y avait un espoir. Mais elle disparut et amena avec elle la dernière trace de l’ordre naturel voulu par Dieu, en plongeant la Fille ainée de l’Église dans un deuil permanent.

C’est le 14 juillet qu’eut lieu le début de l’incitation à la haine envers l’ordre social voulu par Dieu. Rappelons à cet égard l’extermination d’une grande partie du clergé réfractaire (celui qui ne voulait pas jurer fidélité à la République) en Septembre 1792 à l’Abbaye, aux Carmes, à Saint Firmin et à la Force. Cette atrocité fut ainsi décrite par André Chénier, témoin de ces abominables crimes et admirateur de la Révolution Française : « Quoi ! Nul ne resterait pour attendrir l’histoire sur tant de justes massacrés ; Pour descendre jusqu’aux enfers et Chercher le triste fouet, le fouet de la vengeance, Déjà levé sur ces pervers ; Pour cracher sur leurs noms, pour chanter leur supplice ? » [11] Mais les horreurs de ces bourreaux ivres de sang se dissipent devant les dernieres paroles des prêtres égorgés : « Remercions Dieu qui nous appelle à sceller de notre sang la religion que nous professons !  Nous ne pouvons être mieux qu’au pied de la Croix pour faire à Dieu le sacrifice de notre vie. Notre cœur est à Dieu et notre corps au bourreau.  Nous allons à la mort avec la même joie que d’autres fussent allés à des noces. Plutôt mourir que de jurer! »[12]

C’est le 14 juillet aussi qu’eut lieu le début de la discrimination de l’homme crée par Dieu. Rappelons ainsi l’extermination légalisée par la Première République de tout homme de Dieu qui osa prendre les armes pour défendre son Créateur et son lieutenant, à savoir Dieu et le Roi. Et on pourrait mentionner à cet égard les représentants de l’ordre social naturel, à savoir les aristocrates, les prêtres et les paysans de la Vendée dont la fidélité à Dieu et au Roi alla au–delà du tombeau et les transforma en martyrs. Et c’est avec beaucoup de nonchalance que Danton (ex-ministre de la Justice) justifia cette extermination : « Eh bien ! buvons le sang des ennemis de l’humanité, s’il le faut… C’est pour les contre-révolutionnaires que ce tribunal est nécessaire ; c’est pour eux que ce tribunal doit suppléer au tribunal suprême de la vengeance du peuple… Le salut du peuple exige de grands moyens et des mesures terribles… Soyons terribles pour dispenser le peuple de l’être. »[13] Mais pour ces hommes dénaturés les ennemis de l’humanité étaient surtout les femmes et les enfants vendéens tel que l’explique l’un des plus abominable bourreau de la Vendée, le général Westermann : « il n’y a plus de Vendée annonce Westermann à la Convention, elle est morte sous notre sabre libre avec ses femmes et ses enfants (…) Suivant les ordres que vous m’avez donnés, j’ai écrasé les enfants sous les pieds de mes chevaux, massacré les femmes qui n’enfanteront plus de brigands. Je n’ai pas un seul prisonnier à me reprocher. J’ai tout exterminé.»[14]

C’est toujours le 14 juillet qu’eut lieu le début de la fin pour la famille. Miguel de Unamuno, écrivain espagnol, disait, , que si on voulait attaquer la Chrétienté, on devait commencer par attaquer l’un de ses piliers fondamentaux qu’était la famille. Si bien que le divorce et le mariage civil (ou prostitution civile) furent l’œuvre de la Première République Française, l’avortement, l’idéologie du genre ou le mariage pour tous ne représentèrent que la continuation du mal provoqué à partir du 14 juillet.

On pourrait pour autant conclure que fêter le 14 juillet c’est fêter la haine de Dieu et de tout ordre religieux, social et politique que l’homme n’a pas établi, c’est aussi fêter la destruction de la famille. Célébrer le 14 juillet c’est fêter  l’anéantissement progressif de notre identité nationale et chrétienne et, pour autant, c’est fêter le début de la fin.

Catherine de TORQUEMADA

Notes de bas de page

[1] https://www.assemblee-nationale.fr/13/rap-info/i1262.asp

[2]A. van Leuveen,L’Analogie des êtres, 1936, p. 77.

[3] Idem.

[4] Idem.

[5] Idem.

[6] Hervé Pinoteau, la Symbolique Royale Française V-XVIIIe siècles, Éd. Presse Sainte Radegonde, 2003, p. 20.

[7] Hervé Pinoteau, Op. cit., p.77.

[8] Bernard Tissier de Mallerais, La misión toujours actuelle de Sainte Jeanne d’Arc, Conférence à Thouars, 1990 publiée dans la revue Continuité pour la France et le Roi : Dieu Premier Servi, 1990, No.6/7, p. 4.

[9] Jean Barbey, Le Sacre royal dans la revue Dieu Premier Servi, No. 13, 1988,  p. 35.

[10] Ramon Lull, Le livre de Chevalerie,  p. 65, http://www.biblioteca.org.ar/libros/89450.pdf,

[11]A. van Leuveen,L’Analogie des êtres, 1936, p. 77.

[12] Gustave Gautherot, Les Suppliciées de ls Terreur, Paris, 1926, p. 7.

[13] Idem.

[14] Reynald Secher, Vendée: du génocide au mémoricide, Cerf, 2011.

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